LE DERNIER POÈME J’ai rêvé tellement fort de toi, J’ai tellement marché, tellement parlé, Tellement aimé ton ombre, Qu’il ne me reste plus rien de toi. Il me reste d’être l’ombre parmi les ombres D’être cent fois plus ombre que l’ombre D’être l’ombre qui viendra et reviendra ......Dans ta vie ensoleillée....... (ROBERT DESNOS) |
J'AI TANT RÊVÉ DE TOI J'ai tant rêvé de toi que tu perds ta réalité. Est-il encore temps d'atteindre ce corps vivant Et de baiser sur cette bouche la naissance De la voix qui m'est chère ? J'ai tant rêvé de toi que mes bras habitués En étreignant ton ombre À se croiser sur ma poitrine ne se plieraient pas Au contour de ton corps, peut-être. Et que, devant l'apparence réelle de ce qui me hante Et me gouverne depuis des jours et des années, Je deviendrais une ombre sans doute. O balances sentimentales. J'ai tant rêvé de toi qu'il n'est plus temps Sans doute que je m'éveille. Je dors debout, le corps exposé À toutes les apparences de la vie Et de l'amour de toi, le seul Qui compte aujourd'hui pour moi, Je pourrais moins toucher ton front Et tes lèvres que les premières lèvres Et le premier front venu. J'ai tant rêvé de toi, tant marché, parlé, Couché avec ton fantôme Qu'il ne me reste plus peut-être, Et pourtant, qu'à être fantôme Parmi les fantômes et plus ombre Cent fois que l'ombre qui se promène Et se promènera allègrement Sur le cadran solaire de ta vie. (ROBERT DESNOS) |
Penser à toi reste mon silence le plus précieux le plus long le plus orageux silence. Tu es en moi toujours comme mon coeur inaperçu mais comme un coeur qui ferait mal blessure qui ferait vivre. (ALAIN BORNE) |
Il pleure dans mon coeur Comme il pleut sur la ville ; Quelle est cette langueur Qui pénètre mon coeur ? O bruit doux de la pluie Par terre et sur les toits ! Pour un coeur qui s’ennuie O le chant de la pluie ! Il pleure sans raison Dans ce coeur qui s’écoeure. Quoi ! Nulle trahison ?... Ce deuil est sans raison. C’est bien la pire peine De ne savoir pourquoi Sans amour et sans haine Mon coeur a tant de peine ! (PAUL VERLAINE) |
TON NOM J’étais à toi peut-être avant de t’avoir vu. Ma vie, en se formant fut promise à la tienne ; Ton nom m’en avertit par un trouble imprévu ; Ton âme s’y cachait pour éveiller la mienne. Je l’entendis un jour et je perdis la voix ; Je l’écoutai longtemps, j’oubliai de répondre ; Mon être avec le tien venait de se confondre : Je crus qu’on m’appelait pour la première fois. Savais-tu ce prodigue ? Eh bien ! Sans te connaître, J’ai deviné par lui mon amant et mon maître, Et j’ai reconnus dans tes premiers accents, Quand tu vins éclairer mes beaux jours languissants. Ta voix me fit pâlir, et mes yeux se baissèrent . Dans un regard muet nos âmes s’embrassèrent ; Au fond de ce regard ton nom se révéla, Et sans le demander j’avais dit : « Le voilà ! » Dès lors il ressaisit mon oreille étonnée ; Elle y devient soumise, elle y fut enchaînée. J’exprimais par lui seul mes plus doux sentiments ; Je l’unissais au mien pour signer mes serments. Je le lisais partout, ce nom rempli de charmes. .....Et je versais des larmes. D’un éloge enchanteur toujours environné, À mes yeux éblouis il s’offrait couronné. Je l’écrivais...bientôt je n’osais plus l’écrire. Et mon timide amour le changeait en sourire. Il me cherchait la nuit, il berçait mon sommeil, Il résonnait encore autour de mon réveil ; Il errait dans mon souffle, et, lorsque je soupire, C’est lui qui me caresse et que mon coeur respire. Nom chéri ! nom charmant ! oracle de mon sort ! Hélas ! que tu me plais, que ta grâce me touche ! Tu m’annonças la vie, et mêlé dans la mort, Comme un dernier baiser tu fermeras ma bouche. (MARCELINE DESBORDES-VALORME) |
JE VOUDRAIS Je voudrais voir ton visage me sourire Et répondre à ce sourire par un baiser Je voudrais que mon corps effleure ton corps Me blottir tout contre toi Je voudrais m'évanouir dans tes bras ... Qu'il fait bon à l'ombre de ce coeur adoré Quel bonheur de se sentir aimé Je me sens léger, léger comme si j'étais porté Par ton parfum qu'une légère brise emporterait Je voudrais ... mais mon rêve s'est dissipé. (VINCENT DI SANZO)Son recueil de poèmes |
SOUVENIR Son image, comme un songe, Partout s'attache à mon sort ; Dans l'eau pure où je me plonge Elle me poursuit encor : Je me livre en vain, tremblante, A sa mobile fraîcheur, L'image toujours brûlante Se sauve au fond de mon coeur. Pour respirer de ses charmes Si je regarde les cieux, Entre le ciel et mes larmes, Elle voltige à mes yeux, Plus tendre que le perfide, Dont le volage désir Fuit comme le flot limpide Que ma main n'a pu saisir. (DESBORDES-VALMORE) |
SOULAGEMENT Quand je n’ai pas le coeur prêt à faire autre chose, Je sors et je m’en vais, l’âme triste et morose, Avec le pas distrait et lent que vous savez, Le front timidement penché vers les pavés, Promener ma douleur et mon mal solitaire Dans un endroit quelconque, au bors d’une rivière, Où je puisse enfin voir un beau soleil couchant. Ô les rêves alors que je fais en marchant, Dans la tranquillité de cette solitude, Quand le calme revient avec la lassitude ! Je me sens mieux. ......Je vais où me mène mon coeur. Et quelquefois aussi, je m’assieds tout rêveur, Longtemps, sans le savoir, et seul, dans la nuit brune, Je me surprends parfois à voir monter la lune. (EVANTUREL) |
(Michel T Dallaire - 21 mai 1997)Son recueil de poèmes |
Tes yeux sont fermés sur le Bonheur Ton sourire illumine tes rêves Tes gestes sont Douceur Et ton âme s’éleve... Et moi je m’approche lentement Et sur ta joue, tendrement Je dépose un baiser... (OLIVIER) |
LA SOLITUDE Je suis seule, mécontente, au sein de la nature; Quand tout chante l'amour à mes sens émus, Tout est muet, et l'onde, et l'ombre, et la verdure : Avec le monde, Hélas ! mon coeur ne s'entend plus ... ... Incertaine, j'erre dans nos plaines, Ignorée, sans secours, étrangère au bonheur. Dans quel sein épancher mes peines ? Quel est le coeur, hélas ! qui réponde à mon coeur ? Quand mes jours s'éteindront dans la nuit éternelle, Sur ma cendre glacée un amant fidèle Ne viendra point verser de pleurs. Au milieu d'un vallon tranquille, S'élèvera ma tombe- Hélas ! sur cet asile, Quelle main gravera mon nom et mes malheurs ? Aucun sentier, sur cette fosse obscure, D'un ami gémissant me trahira les pas. Le voyageur, errant à l'aventure, Foulera seul le siège du trépas ... ... Jamais !... O vers où mon âme soupire, Vous le savez encor. Ah ! si jusque sur vous la mort N'a pas étendu son empire, Autour de mon tombeau, redites chaque jour, Dites à tout ce qui respire, Le nom chéri, et celui de l'amour. (RAMOND DE CARBONNIERES) |
LES DESTINÉES Poésie! Ô trésor! perle de la pensée! Les tumultes du coeur, comme ceux de la mer, Ne sauraient empêcher ta robe nuancée D'amasser les couleurs qui doivent te former. Mais sitôt qu'il te voit briller sur un front mâle, Troublé de la lueur mystérieuse et pâle, Le vulgaire effrayé commence à blasphémer. Le pur enthousiasme est craint des faibles âmes Qui ne sauraient porter son ardeur et son poids. Pourquoi le fuir? - La vie est double dans les flammes, D'autres flambeaux divins nous brûlent quelquefois: C'est le Soleil du ciel, c'est l'Amour, c'est la Vie: Mais qui de les éteindre n'a jamais eu envie? Tout en les maudissant, on les chérit tous trois... (ALFRED DE VIGNY) |
CAGE D'OISEAU Je suis une cage d’oiseau Une cage d’os Avec un oiseau L’oiseau dans ma cage d’os C’est la mort qui fait son nid Lorsque rien n’arrive On entend froisser ses ailes Et quand on a ri beaucoup Si l’on cesse tout a coup On l’entend qui roucoule Au fond Comme un grelot C’est un oiseau tenu captif La mort dans ma cage d’os Voudrait-il pas s’envoler Est-ce vous qui le retiendrez Est-ce moi Qu’est-ce que c’est Il ne pourra s’en aller Qu’après avoir tout mangé Mon coeur La source du sang Avec la vie dedans Il aura mon âme au bec. (SAINT-DENYS GARNEAU) |
J’attends, Le vent gémit, Le soir vient. L’heure sonne Mon coeur impatient s’émeut. Rien ni personne. J’attends, les yeux fermés pour ne pas voir le temps Passer en déployant les ténèbres. J’attends. Cédant au sommeil dont la quiétude tente, J’ai passé cette nuit en un rêve d’attente. Le jour est apparu baigné d’or pourpre et vif, Comme hier, comme avant, mon coeur bat attentif. Et je suis énervé d’attendre, sans comprendre, Comme hier et demain, ce que je puis attendre. J’interroge mon coeur, qui ne répond pas bien... Ah ! qu’il est douloureux d’attendre toujours-Rien ! (ALBERT LOZEAU) |
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